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哲学いろいろ

Mise au jour d'un "Evangile de Judas"

La Croix.com

  • エスの死直後に書かれた聖書諸福音をもとに 解釈を入れて書かれた――つまり もう少し言うと 裏切り者とされたユダを擁護しようとして書かれた――と考えられる(Rodolphe Kasser)という。この点も 大事だと思われる。
  • だから いけないと言わないが 福音書の性質・価値は 共観福音書とは ちがうはずである。

Les sites Internet de "La Croix" et du "Monde de la Bible" publient des informations sur le contenu d'un manuscrit copte recopiant un évangile apocryphe que l'on croyait perdu, "réhabilitant la figure de Judas". Le traducteur du document s'exprime pour la première fois publiquement sur le sujet.
Il est rare que Judas fasse la « une » de l’actualité. Et pourtant, le célèbre éditeur américain National Geographic Society n’a pas hésité, jeudi 6 avril, a rendre publique une information troublante : la traduction d’un texte s'intitulant «évangile» , rédigé probablement au milieu du IIe siècle de notre ère, et signé du nom de Judas, le disciple qui trahit Jésus. Ce texte est désormais accessible à tout un chacun, en langue anglaise (pour l’instant).

Dans un entretien exclusif, accordé à La Croix et au Monde de la Bible, le professeur Rodolphe Kasser, titulaire honoraire de la chaire de coptologie de l’Université de Genève, qui a traduit le manuscrit du copte ne cache pas son émotion : « cela a été pour moi un choc lorsque j’ai été mis en contact, en 2001, avec ce manuscrit que nous croyions irrémédiablement perdu, alors que nous connaissions son existence par une mention de l’évêque Irénée de Lyon (vers 130-202 ap. J.-C.) qui s’indigne contre ce texte ! C’est de toute façon extrêmement rare de retrouver un manuscrit d'un traité aussi ancien. Et celui-ci est remarquablement complet : nous avons les trois-quarts du texte.»

L’apôtre réputé félon qui vécut en Palestine au début du 1er siècle et dont les Evangiles racontent qu’il vendit Jésus aux prêtres du Temple pour trente pièces d’argent aurait-il écrit pour justifier sa trahison ? Son rôle - néfaste mais essentiel - dans la Passion a toujours intrigué : pourquoi désigne-t-il Jésus à ses bourreaux en l’embrassant ? Pourquoi, peu de temps après, pris de remords, rend-t-il l’argent et va-t-il se pendre ?

Un document d'un intérêt exceptionnel

Ce nouveau manuscrit peut-il modifier notre vision des Evangiles ? Ces questions font sourire Rodolphe Kasser : « Oui, en quelque sorte, la figure de Judas est «réhabilitée» dans ce texte car son rôle négatif trouve une explication positive. Mais il faut dire et redire qu’il s’agit d’une interprétation postérieure, imaginée au IIe siècle ap. J.-C. Vous ne trouverez ici aucune information historique nouvelle sur le véritable Judas l’Iscariote. »

Il n’empêche, cet « Evangile de Judas » reste d’un intérêt exceptionnel pour mieux comprendre les débuts du christianisme, qui se développe alors plus ou moins clandestinement dans l’Empire romain, en même temps que d’autres courants religieux. Pour Rodolphe Kasser en effet, si ce texte a été rédigé en grec (puis traduit en copte) dans un milieu déjà très familier du christianisme, il relève pourtant clairement d’un autre mouvement religieux : la «gnose», qui signifie «connaissance» en grec. Il s’agit d’une sorte de religion ou philosophie ésotérique comprenant de nombreuses sectes, qui s’est développée entre le second et le quatrième siècle ap. J.-C. dans l’Empire romain.

De petits groupes d’initiés, les gnostiques, inspirés par certaines idées philosophiques grecques et par les Ecritures bibliques, réinterprétaient à leur façon le christianisme. Ils pensaient que le véritable Dieu était inconnaissable et incréé*1 « hors de toute matière ». Il était masqué aux yeux des hommes par un dieu inférieur malfaisant, créateur du monde, le dieu biblique. Pour les gnostiques, le monde est donc un lieu infesté par le mal, les ténèbres et le péché, où l’on adore un usurpateur. Seuls seraient « élus », sauvés, ceux qui échapperaient à cette supercherie*2 et atteindraient la perfection par une initiation à des pratiques, des paroles de type magique. Ceux-là rejoindraient la lumière, le véritable Dieu après un parcours difficile. Inutile pour eux d’essayer de convertir les autres, ni de se reproduire, car le monde court dans son ensemble, à sa perte…

Mieux comprendre le mouvement gnostique

Cette vision très pessimiste entrait en totale contradiction avec le message de salut universel des premiers missionnaires chrétiens ! L’Eglise, après 313 - date à laquelle le culte chrétien est autorisé avec bienveillance par l’Empire romain - a logiquement écarté les nombreux textes gnostiques, et d’autres au caractère simplement trop légendaire, du canon biblique. Ils sont depuis lors connus sous le nom d’ « apocryphes » c’est à dire « cachés »…

Les manuscrits de ces textes ont peu à peu disparu, victimes de campagnes volontaires de destruction, de l’oubli des hommes ou de l’usure du temps. Le mouvement gnostique nous est donc surtout connu par les arguments développés contre lui par les théologiens de cette époque, dans des textes de controverses. D’où l’importance de «L’évangile de Judas» qui ouvre un accès direct à cette pensée et fera mieux comprendre aussi les réponses des chrétiens de ce temps.

Le récit développé dans « l’évangile de Judas », commence par montrer Jésus qui rejoint ses disciples en train de préparer la Pâque. Jésus se moque d’eux et explique que célébrer l’eucharistie est inutile ! « Il essaie de les instruire des idées gnostiques, mais il voit très bien, explique Rodolphe Kasser, qu’ils sont trop stupides pour le comprendre. Sauf Judas, que les autres détestent mais que Jésus affectionne particulièrement. » Jésus, à l’issue d’un long dialogue où il l’initie et interprète ses rêves, demande lui-même à Judas de le livrer aux autorités afin qu’il soit délivré de son corps matériel et retourne vers la lumière.
«Le scribe savait qu’un titre pareil ferait scandale !»

Et le récit se termine sobrement sur la rencontre de Judas avec les Juifs qui cherchent Jésus. « L’auteur s’adresse donc à un public qui connaît les évangiles et en même temps, son but est de leur révéler leur « vrai » sens, décrypte le spécialiste. Les gnostiques ont toujours aimé « retourner » des personnages qui symbolisent le mal ou l’ambiguïté dans la Bible, comme Caïn, le premier criminel; le roi Hérode qui massacra les enfants innocents; ou encore Thomas, le disciple incrédule et ici Judas, le traître perfide. En ayant ce manuscrit sous les yeux, on comprend mieux la colère d’Irénée de Lyon pour qui cette interprétation de la relation entre Judas et Jésus est insultante et hérétique ! »

Dans quelques mois, la publication scientifique du manuscrit avec des photographies de chaque page, permettra aux chercheurs du monde entier de se pencher sur ce texte à leur tour. Rodolphe Kasser espère que la confrontation avec d’autres textes gnostiques apportera de nouvelles informations. Il conclut avec humour : « le scribe qui a écrit « l’évangile de Judas » savait qu’un titre pareil ferait scandale ! » Mais il ignorait sans doute que sa provocation attiserait*3 encore la curiosité au XXe siècle…

Sophie LAURANT

Un codex copte du IIIe siècle, publié aux Etats-Unis, éclaire le rôle de Judas dans l'histoire chrétienne

LE MONDE | 08.04.06 | 14h18 • Mis à jour le 08.04.06 | 14h18

Faut-il réhabiliter Judas ? Depuis deux mille ans, le nom de Judas Iscariote - l'apôtre de Jésus-Christ que les Evangiles présentent comme le félon*4 qui aurait vendu son maître aux Romains pour 30 pièces d'argent - symbolise la traîtrise. Mais un manuscrit en copte dialectal, retrouvé dans le désert égyptien au début des années 1970, dont une traduction a été publiée, jeudi 6 avril à Washington, par la National Geographic Society, pourrait conduire à rectifier la "légende noire" de Judas.


Restaurer et dater ce manuscrit resté caché dans le désert de Haute-Egypte, près de Mynia, pendant plus de mille six cents ans, et conservé grâce à la sécheresse a été en soi un exploit scientifique. Ce codex compte 66 feuilles de papyrus et contient un exemplaire du fameux "Evangile" apocryphe (non reconnu par les Eglises) de Judas (26 feuilles).

Depuis sa découverte il y a plus de trente ans, il est passé entre les mains de plusieurs antiquaires, en Europe et aux Etats-Unis, et il tombait en morceaux. La restauration, engagée en 2001 par la Fondation Maecenas de Bâle (Suisse) et la National Geographic Society, a consisté à reconstituer un puzzle de près de 1 000 pièces.

Cette restauration a été accompagnée d'examens visant à authentifier l'historicité du document. L'analyse au carbone 14 - menée sur cinq minuscules échantillons par le laboratoire de l'université d'Arizona, qui avait déjà daté les rouleaux des manuscrits la mer Morte - a livré une datation située entre les années 220 et 340.

Les travaux menés sur l'encre et les études spectrographiques du papyrus n'ont montré aucune discordance avec les données connues sur les matériaux employés aux IIIe et IVe siècles. Enfin, l'analyse paléographique du texte, effectuée par Stephen Emmel, professeur d'études coptes à l'université de Münster (Allemagne), a rapproché le graphisme du texte avec celui d'autres écrits datant environ de l'an 400.

Ce document copte, ainsi authentifié et daté, ne constitue pourtant pas une révolution dans la connaissance des origines chrétiennes : l'existence d'un Evangile de Judas en langue grecque est connue depuis longtemps. Dès 180 après J.-C., l'évêque Irénée de Lyon combat cet Evangile apocryphe dans son fameux traité Contre les hérésies. Les savants en fixent même la rédaction au début du IIe siècle (entre 130 et 170) et l'attribuent à un groupe gnostique, celui des Caïnites (de Caïn, la figure biblique). Le manuscrit copte restauré est donc une copie et une traduction de cette version grecque plus ancienne.

Grâce à lui, la connaissance de l'"Evangile de Judas" devrait pourtant progresser. Les expressions du manuscrit copte déjà déchiffrées et traduites laissent entendre que la relation entre Jésus et Judas aurait été plus positive que celle que rapportent les Evangiles officiels. Selon les révélations de la revue National Geographic, le Maître aurait dit à Judas : "Tu les surpasseras tous. Tu sacrifieras l'homme qui m'a revêtu." Jésus aurait consenti à la trahison de Judas et prévenu : "Tu seras stigmatisé par les autres générations."

Ce sont là des mots typiques de la littérature gnostique du IIe siècle, celle qui a inspiré les Evangiles apocryphes ("cachés"), comme celui dit "de l'apôtre Thomas", celui de l'apôtre Pierre ou de Marie-Madeleine, qui a fait la fortune du Da Vinci Code. Les gnostiques étaient ceux qui prétendaient que la connaissance ("gnose") de Dieu ne pouvait être réservée qu'à un nombre limité d'initiés et réinterprétaient librement les écritures juives et chrétiennes.

PARENTÉS TROUBLANTES

Les gnostiques aimaient "retourner" les personnages qui symbolisent le Mal, comme Caïn, Hérode, Thomas l'incrédule ou Judas. C'est ce que rappelle Rodolphe Kasser, ancien professeur de coptologie à l'université de Genève, interrogé sur cette découverte par le mensuel Le Monde de la Bible. Et il met en garde contre tout emballement visant à une révision du rôle de Judas : cet Evangile de Judas est "une interprétation postérieure imaginée au IIe siècle. Vous ne trouverez, dans le document copte, aucune information historique nouvelle sur le véritable Judas." Voilà qui réduit la portée du "scoop mondial" du National Geographic !

Rappelons que les Evangiles apocryphes sont des textes que n'a pas retenus la tradition de l'Eglise, pas forcément par dissimulation, mais simplement parce qu'ils ont été rédigés et connus tardivement. Il existe pourtant des parentés troublantes entre ces textes et ceux des seuls quatre Evangélistes officiels - Marc, Matthieu, Luc et Jean - connus dès le Ier siècle.

Pierre Barthélémy et Henri Tincq
Article paru dans l'édition du 09.04.06



*1:INCRÉÉ, -ÉE, adj. Qui existe sans avoir été créé

*2:SUPERCHERIE, subst. fém.Tromperie, plus ou moins habilement calculée et exécutée, impliquant généralement la substitution du faux au vrai.

*3:ATTISER, verbe trans.Animer un feu en rapprochant les tisons, en avivant la flamme

*4:FÉLON, ONNE, adj.DR. FÉOD. [En parlant du vassal] Qui viole les engagements contractés envers le seigneur.