60 ans après la guerre, Tokyo tend la main à l'Asie pour apaiser la discorde
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TOKYO (AFP) - 15/08/2005 08h26 - Soixante ans après sa capitulation, le Japon s'est efforcé lundi de tendre la main aux pays d'Asie, en réitérant son "profond remord" et ses "sincères excuses" pour les "souffrances" infligées à ses voisins pendant la Seconde Guerre mondiale.
Afin de ne pas jeter d'huile sur le feu, le Premier ministre Junichiro Koizumi s'est abstenu de visiter le sanctuaire du Yasukuni à Tokyo, haut lieu spirituel du nationalisme nippon.
Une telle initiative aurait été considérée en Asie comme une provocation et n'aurait pas manqué de déclencher la fureur des Chinois et des Coréens.
"Notre pays, par la domination coloniale et l'agression, a causé de terribles dégâts et souffrances aux peuples de nombreux pays, particulièrement à ceux des nations asiatiques", a reconnu M. Koizumi dans un communiqué.
"Nous acceptons humblement ces faits historiques et nous exprimons de nouveau nos sentiments de profond remord et sincères excuses", a souligné le Premier ministre.
De son côté, l'Empereur Akihito a émis le voeu que le Japon ne fasse plus jamais la guerre, soixante ans jour pour jour après que son père, le divinisé Hirohito, eut annoncé la reddition*1 de l'armée impériale.
"Au vu de l'histoire, je souhaite sincèrement que les ravages de la guerre ne soient jamais répétés", a dit l'Empereur devant 7.000 vétérans et officiels rassemblés dans le hall du Budokan près du Palais impérial.
"Avec tous les Japonais, je pleure*2 ceux qui sont tombés sur le champ de bataille et qui ont perdu la vie à cause des horreurs de la guerre", a assuré l'Empereur en faisant part de sa "profonde émotion".
Les nouvelles excuses de Tokyo sont conformes aux remords publics exprimés à moult*3 reprises dans le passé par les dirigeants nippons, en particulier en 1995, lors du cinquantenaire de la fin de la guerre.
M. Koizumi avait d'ailleurs déjà utilisé les mêmes mots en avril dernier, en pleine crise sino-japonaise, lors d'un sommet afro-asiatique à Jakarta.
Mais Chinois et Coréens ne sont toujours pas convaincus de la sincérité nippone.
M. Koizumi a donc promis de "forger des relations de coopération orientées vers l'avenir et fondées sur la confiance et la compréhension mutuelles" avec ses voisins.
Il a souligné que, depuis soixante ans, le Japon avait prouvé sa sincérité "à travers des activités humanitaires, son aide au développement et les échanges culturels et économiques" avec l'Asie.
"Ensemble avec les pays asiatiques comme la Chine ou la Corée du Sud, nous devons joindre nos efforts pour assurer la paix dans cette région", a-t-il plaidé.
C'est la première fois que ces deux pays sont spécifiquement mentionnés par leur nom dans une telle déclaration de repentance.
Ces derniers mois, les relations entre le Japon et ses voisins se sont spectaculairement dégradées notamment à cause des visites régulières du Premier ministre nippon au sanctuaire shintoïste du Yasukuni à Tokyo.
Ce lieu sacré honore les âmes de tous les Japonais morts pour la patrie, dont celles de 14 "criminels de guerre de catégorie A", condamnés par les Alliés après 1945.
Comme prévu, M. Koizumi --confronté à des élections dans moins d'un mois-- a renoncé à s'y rendre lundi, date hautement symbolique qui marque non seulement la défaite du Japon mais aussi la principale fête des morts et la journée annuelle des anciens combattants.
En revanche, des dizaines de milliers de Japonais, la plupart des gens âgés, se sont pressés au Yasukuni afin de rendre hommage aux soldats nippons tués pendant la Seconde Guerre mondiale, a constaté l'AFP. Une foule considérable pour le Japon.
Parmi les visiteurs, on dénombrait deux ministres, des dizaines de députés et attachés parlementaires et, bien sûr, les personnalités les plus en vue de*4 la droite nationaliste comme le maire de Tokyo Shintaro Ishihara.
Quelques anciens combattants nostalgiques avaient revêtu les uniformes de l'armée impériale.
